Retrouver l'article sur le site de SoleilL'adaptation du Club du Suicide était-elle un souhait de l'un de vous en particulier, ou l'avez-vous choisi ensemble ?
Clément et Eddy : Notre envie première était de travailler ensemble, de préférence sur un sujet avec une teinte littéraire et romantique puisque nous avons ce goût en commun. À la même époque où nous nous faisions cette réflexion, notre ami Marion Mousse adaptait avec bonheur Frankenstein. Nous nous sommes alors mis en quête ensemble d'un roman qui refléterait nos envies et le Club du Suicide de Stevenson s'est imposé.
Comment s’est déroulée votre collaboration ?
Clément et Eddy : On se connaît bien, on travaille dans le même atelier, nos bureaux sont dans la même pièce, et on est aussi potes en dehors de la BD. On sait faire avancer un projet en respectant les aspirations de chacun et les réalités économiques.
Eddy : C'était la première fois que je faisais un livre à l'aquarelle, c'était un gros travail qui a demandé beaucoup de concentration parce que ce médium ne laisse pas de place à l'erreur. Clément, qui travaille déjà en couleur directe depuis quelques années, ne m'en a pas demandé plus que je ne pouvais faire. Je lui demandais des conseils, lui me proposait des choses, comme nous le faisons tous à l'atelier quand nous travaillons ensemble ou pas. Nous échangeons mais en n'imposant rien aux autres. On évite de bloquer sur des détails insignifiants que le lecteur ne verra même pas !
Clément : On avait la même vision de ce que devait être la narration, donc toutes nos idées allaient dans le même sens. Et comme je suis aussi dessinateur, notre collaboration était très étroite pour trouver des solutions graphiques quand la question se posait. Eddy a un bon sens du rythme des dialogues et il m'a aussi aidé à éviter des lourdeurs ou facilités dans les textes.
Les principaux sujets du Club du Suicide sont, outre la mort, le hasard et la justice. Est-ce que ce sont des thèmes qu'il était déterminant pour vous de traiter ?
Clément et Eddy : La mort, le hasard et la justice sont des thèmes passionnants, que l'on retrouve soit ensemble, soit séparément dans toute grande œuvre livresque, mais Le Club du Suicide n'est pas un livre qui traite profondément de ces sujets. C'est plutôt un exercice de style tragicomique, une invitation à se plonger dans une aventure humaine un tantinet ridicule à travers une galerie de personnages étranges et ambigus.
Comment le fait que ce recueil ait été écrit en roman-feuilleton (terreau fait d'ellipses et de changements d'atmosphères) a-t-il servi votre interprétation ?
Clément : Du pain béni ! Le livre regorge d'idées parfois à peine amorcées qui m'ont permis d'aller creuser des scènes inattendues. De plus, le côté feuilleton, cette suite d'épisodes, fait écho à la substance même de la bande dessinée : la narration par l'ellipse.
Était-il facile de travailler sur des personnages très ancrés dans la convention morale du XIXe siècle (honneur et justice), codes et valeurs qui ont tendance à se perdre à notre époque ?
Clément : L'époque victorienne porte déjà en elle la « modernité », de plus les travers et grandeurs des personnages du Club du Suicide sont universels. Le prince Florizel est un jeune aristocrate qui cherche l'aventure, le duo qu'il forme avec le Colonel Géraldine nous parle d'une amitié indéfectible, et leur courage s'oppose au cynisme et à la lâcheté de tous ceux qu'ils vont rencontrer, ce sont des thèmes intemporels. Ce livre pourrait se transposer à notre époque sans trop de difficultés.
Pour l'architecture, les scènes en extérieurs, et les costumes vous êtes vous documentés, ou avez vous laissé travailler votre imagination ?
Eddy : Évidemment, je me suis documenté. On trouve facilement des documents sur les vieux quartiers de Londres ou de Paris. J'ai acheté un livre sur le mobilier anglais du XIXe siècle et bien sûr, sur Internet, il y a beaucoup de choses. Mais je me décroche rapidement de la documentation parce que cela nuit à ma créativité. Ce qui m'intéresse, c'est de créer des ambiances et de suggérer des émotions, pas de reproduire parfaitement une époque. Après, je demande toujours aux potes de mon atelier (le Zarmatelier à Marseille) si cela paraît crédible. Si ça ne l'est pas, je corrige. Mais comme aucun d'eux n'est spécialiste de l'époque victorienne, je ne change pas grand chose, ha ha !!! En fait, tout n’est sans doute pas juste dans ce livre, comme dans tous mes livres, mais laissez-vous porter par l'histoire !...
Avez-vous une préférence pour une personnage en particulier, et si oui, pourquoi ?
Eddy : Il n'y en a pas un en particulier. Ce livre contient une galerie de personnages assez conséquente, ils apparaissent et disparaissent au cours de l'histoire et il a fallu à chaque fois en imaginer de nouveaux, ce qui est plutôt intéressant. Ils ont tous un petit côté ridicule et pathétique, et c'était amusant à imaginer. J'ai une tendresse particulière pour le jeune homme aux tartelettes du début, c'est le seul qui désire vraiment mourir mais cela ne se passe jamais comme il veut !
mercredi 19 mai 2010
Interview de C. Baloup et E. Vaccaro pour soleilprod.com
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